Briefe und Texte
aus dem intellektuellen
Berlin um 1800

Brief von Adolf von Buch an Louis de Beausobre (Magdeburg, 13. August 1761)

 

 

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Monsieur,

Ce n’est, que dans la satisfaction, que Vous avés a obliger Vos amis, et dans le petit degré de ce sentiment, que
Vous supposés en moi, que peuvent être fondés Vos excuses; de ne m’avoir pas envoyé les lettres sur la litterature
nouvelle avec la premiere poste. Je craindrois, de Vous charger d’aucune commission, si je ne croyois qu’un de
Vos partis de plaisir en puisse être derangé. Je suis faché, que la negligence de mon domestique Vous ait empeché
de m’envoyer N° 17 de ces feuilles, dans lequel la critique de la nouvelle Heloise commence; ce que ces Journa
listes disent du stile de ce Roman, me paroit assés fondé; il y a plus d’imagination, que du sentiment; mais la de
scription de la mort de Julie, faite par Mr. Wollmar me paroit toujours un fort beau morceau, elle m’a tiré des
larmes, ce qui est chés moi la pierre de touche du pathetique. Cependant les Romans de Richardson me plaisent
d’avantage, parcequ’ils peignent plus exactement la nature et n’employent pas des traits moins forts, que ceux
qu’on trouve dans Rousseau. On trouveroit plutôt une Clarisse, qu’une Julie, et la description de la mort de la
premiere est encore beaucoup plus tragique, que celle de la derniere. Peut-être mon jugement sur le merite de ces
ouvrages n’est pas tout-a-fait juste, mais au moins je puis le donner avec plus de connoissance de cause, que sur l’Ins
truction militaire
. C’est aux maîtres de l’art, a decider de ces matieres; autant que j’en puis juger, j’y trouve des
raisonnements fort solides, enoncés avec cette force d’expression, qui fait le caractere distinctif des ecrits du Roi. La
presente guerre lui aura fourni bien d’occasions de constater ses sentiments par l’experience, car l'ouvrage1 me paroit
ecrit dans le calme, qui preceda le present orage. L’ingenuité, avec laquelle il convient de ses fautes est digne d’un
grand genie, et la maniere, dont il fait en profiter, le marque encore plus. La campagne presente, quoique moins bril-
lante que les precedentes; me paroit, comme a Vous un chef d’œuvre. Prevoir et prevenir les desseins de son ennemi[...]
empecher deux armées superieures a remporter le moindre avantage et les forcer a changer de plan d’operations, voi
la des traits, qui rendront cette campagne instructive pour tout militaire. Plut a Dieu, que la vivacite naturelle
a un esprit superieur, ne l’emporte sur l’esprit juste du grand General, qui a à menager les dernières ressources de son
pays. Le doute, que le Roi ait êté a Breslau, comme Vous me le marqués; nous avons des lettres de l’armée [...]
qui disent, qu’il occupe encore le camp de Strehlen, tandis que le General Knoblauch, posté sous les [...][...]-
lau
defend cette capitale contre les entreprises des Russes.

Vous Vous êtonnés, Monsieur, que je n’ai point fait un tour a Strelitz, mais comment voulés Vous [...]
l’idée a beaucoup de personnes, qu’on desesperoit ici de la tenue du Congrès et que la fuite de l’Amba[...] [...]
bruit, qu’on auroit accredité ici plus encore, qu’autre part, parcequ’il y a ici nombre de personnes [...]
quand ils s’eloignent du sentiment de tout le monde, et qui n’ont eu d’autre sujet, de douter du Cong[...] [...]

monde le croyait. Il faut s’abstenir quelquefois de demarches fort innocentes, pour ne pas donner a glo
ser a ces hypercritiques, qui sont d’autant plus petits, qu’ils se croyent plus grands. J’avois pourtant dessein
d’aller voir la foire de Brounsvic , qui commence Lundi prochain, mais la mort du Prince Henri de Brounsvic,
qui repand la tristesse sur cette Cour, a derangé mes projets. Il est etonnant, que la blessure de ce Prince aye
êté mortelle, apresque la balle, qui l’avoit causé, êtoit passé par le moyen d’un lavement. Le Comte Göller
est allé a Perleberg de la part du Roi et le Comte de Lehndorff de la part de la Reine, pour y recevoir et com-
plimenter la Princesse de Strelitz. Md. de Bonin, de Kalb, de Lehndorff et Mll. de Knesebek s’y sont aussi
rendus et elles ont dessein d’aller jusqu'a Stade voir le fameux homme, qui sortit des ports d’Angleterre
comme Amiral d’une belle flotte, et y retourna trois ans après, comme Aventurier, ayant fait le tour du mon-
de. Nos passeports sont entre les mains du Prince de Gallitzin, Envoyé Russe a Londres, mais il ne les a pas
delivres, a cause du nouvel incident, qu’on a refusé d’admettre le Comte de Pergen comme chargé des
interets de l’Empire. Cette affaire pourroit bien retarder l’ouverture du Congrès pour quelques mois; voila
la vraye raison de notre sejour d’ici, sur lequel bien de personnes raisonnent a tort et a travers, puisqu’ils
ne le savent pas et qu’ils veulent pourtant faire les entendus; je Vous prie de n’en point parler.

Si vous pouvés me faire avoir l’ecrit de la Cour de Vienne, dont vous me parlés, je Vous prie, de me l’en
voyer, aussi bien, que la reponse, quand elle paroitra. Si Justi en est chargé, elle sera dure, prolixe et bas-
sement ecrite, mais il y aura, j’espere des bonnes reflexions, a cause des connoissances de l’interieur
du Gouvernement et de plusieurs anecdotes, qu’il a acquis par ses voyages et son sejour a Vienne.
Dites a mon domestique, qu’il doit de tems en tems se rendre chés Vous, pour savoir, si Vous n’avés rien
a lui ordonner; il faut bien qu’il soit au moins a portée, pour faire quelquefois des commissions, que
je Vous prierai, de lui donner. Si j’êtois allé a Brounsvic, j’aurois eu besoin de Dominos; deman-
des lui, s’ils sont en bon êtat, puisqu’une belle occasion se pourroit presenter de nouveau. Adieu
portés Vous bien et jouissés de tous les agrements, que Vous pouvés vous procurer.

Monsieur,

Ce n’est, que dans la satisfaction, que Vous avés a obliger Vos amis, et dans le petit degré de ce sentiment, que Vous supposés en moi, que peuvent être fondés Vos excuses; de ne m’avoir pas envoyé les lettres sur la litterature nouvelle avec la premiere poste. Je craindrois, de Vous charger d’aucune commission, si je ne croyois qu’un de Vos partis de plaisir en puisse être derangé. Je suis faché, que la negligence de mon domestique Vous ait empeché de m’envoyer N° 17 de ces feuilles, dans lequel la critique de la nouvelle Heloise commence; ce que ces Journalistes disent du stile de ce Roman, me paroit assés fondé; il y a plus d’imagination, que du sentiment; mais la description de la mort de Julie, faite par Mr. Wollmar me paroit toujours un fort beau morceau, elle m’a tiré des larmes, ce qui est chés moi la pierre de touche du pathetique. Cependant les Romans de Richardson me plaisent d’avantage, parcequ’ils peignent plus exactement la nature et n’employent pas des traits moins forts, que ceux qu’on trouve dans Rousseau. On trouveroit plutôt une Clarisse, qu’une Julie, et la description de la mort de la premiere est encore beaucoup plus tragique, que celle de la derniere. Peut-être mon jugement sur le merite de ces ouvrages n’est pas tout-a-fait juste, mais au moins je puis le donner avec plus de connoissance de cause, que sur l’Instruction militaire. C’est aux maîtres de l’art, a decider de ces matieres; autant que j’en puis juger, j’y trouve des raisonnements fort solides, enoncés avec cette force d’expression, qui fait le caractere distinctif des ecrits du Roi. La presente guerre lui aura fourni bien d’occasions de constater ses sentiments par l’experience, car l'ouvrage1 me paroit ecrit dans le calme, qui preceda le present orage. L’ingenuité, avec laquelle il convient de ses fautes est digne d’un grand genie, et la maniere, dont il fait en profiter, le marque encore plus. La campagne presente, quoique moins brillante que les precedentes; me paroit, comme a Vous un chef d’œuvre. Prevoir et prevenir les desseins de son ennemi[,] empecher deux armées superieures a remporter le moindre avantage et les forcer a changer de plan d’operations, voi la des traits, qui rendront cette campagne instructive pour tout militaire. Plut a Dieu, que la vivacite naturelle a un esprit superieur, ne l’emporte sur l’esprit juste du grand General, qui a à menager les dernières ressources de son pays. Le doute, que le Roi ait êté a Breslau, comme Vous me le marqués; nous avons des lettres de l’armée [...] qui disent, qu’il occupe encore le camp de Strehlen, tandis que le General Knoblauch, posté sous les [...][Bres]lau defend cette capitale contre les entreprises des Russes.

Vous Vous êtonnés, Monsieur, que je n’ai point fait un tour a Strelitz, mais comment voulés Vous [...] l’idée a beaucoup de personnes, qu’on desesperoit ici de la tenue du Congrès et que la fuite de l’Amba[ssadeur] [a fait grand] bruit, qu’on auroit accredité ici plus encore, qu’autre part, parcequ’il y a ici nombre de personnes [...] quand ils s’eloignent du sentiment de tout le monde, et qui n’ont eu d’autre sujet, de douter du Cong[rès] [...]

monde le croyait. Il faut s’abstenir quelquefois de demarches fort innocentes, pour ne pas donner a gloser a ces hypercritiques, qui sont d’autant plus petits, qu’ils se croyent plus grands. J’avois pourtant dessein d’aller voir la foire de Brounsvic , qui commence Lundi prochain, mais la mort du Prince Henri de Brounsvic, qui repand la tristesse sur cette Cour, a derangé mes projets. Il est etonnant, que la blessure de ce Prince aye êté mortelle, apresque la balle, qui l’avoit causé, êtoit passé par le moyen d’un lavement. Le Comte Göller est allé a Perleberg de la part du Roi et le Comte de Lehndorff de la part de la Reine, pour y recevoir et complimenter la Princesse de Strelitz. Md. de Bonin, de Kalb, de Lehndorff et Mll. de Knesebek s’y sont aussi rendus et elles ont dessein d’aller jusqu'a Stade voir le fameux homme, qui sortit des ports d’Angleterre comme Amiral d’une belle flotte, et y retourna trois ans après, comme Aventurier, ayant fait le tour du monde. Nos passeports sont entre les mains du Prince de Gallitzin, Envoyé Russe a Londres, mais il ne les a pas delivres, a cause du nouvel incident, qu’on a refusé d’admettre le Comte de Pergen comme chargé des interets de l’Empire. Cette affaire pourroit bien retarder l’ouverture du Congrès pour quelques mois; voila la vraye raison de notre sejour d’ici, sur lequel bien de personnes raisonnent a tort et a travers, puisqu’ils ne le savent pas et qu’ils veulent pourtant faire les entendus; je Vous prie de n’en point parler. Si vous pouvés me faire avoir l’ecrit de la Cour de Vienne, dont vous me parlés, je Vous prie, de me l’envoyer, aussi bien, que la reponse, quand elle paroitra. Si Justi en est chargé, elle sera dure, prolixe et bassement ecrite, mais il y aura, j’espere des bonnes reflexions, a cause des connoissances de l’interieur du Gouvernement et de plusieurs anecdotes, qu’il a acquis par ses voyages et son sejour a Vienne. Dites a mon domestique, qu’il doit de tems en tems se rendre chés Vous, pour savoir, si Vous n’avés rien a lui ordonner; il faut bien qu’il soit au moins a portée, pour faire quelquefois des commissions, que je Vous prierai, de lui donner. Si j’êtois allé a Brounsvic, j’aurois eu besoin de Dominos; demandes lui, s’ils sont en bon êtat, puisqu’une belle occasion se pourroit presenter de nouveau. Adieu portés Vous bien et jouissés de tous les agrements, que Vous pouvés vous procurer.