
Staatsbibliothek zu Berlin / Handschriftenabteilung
Weiterverwendung nur mit Genehmigung der Staatsbibliothek zu Berlin
Quelque envie que j’aie de Vous entretenir au long, de poursuivre à
Vous faire l’extrait de mon journal et surtout de répondre amplement
à Vos trois agréables lettres du 17, 22 et 31 de Mars, je ne saurois avoir
pour aujourd’hui cette douce satisfaction : les occupations Academiques,
les diverses commissions dont je suis chargé, et surtout le triste etât
de mon chèr père m’occupent tour à tour et me laissent à peine des
momens libres. Je ne sais Monsieur et très honoré Oncle, si je Vous ai dejà parlé de cette maladie, qui tourmente mon pauvre père dejà depuis
le 4ème Mars : cela commencoiat avec un rhumatisme de plus en plus douloureuses
les douleurs se jetterent ensuite dans le bas-ventre, et aprésent ce sont
des angoisses terribles que mon père essuïe. Mon frère consulta un autre
Medecin très habile, mais jusqu’ici on n’a pû trouver aucun rémede
qui ait levé le mal radicalement : toujours de nouvelles rechûtes après
des soulagemens tantôt de trois, tantôt de deux et souvent même d’un
seul jour. La reponse de Lambert est grotesque, ce n’etoit point une
acceptation : il dit qu’il voyoit très bien qu’on ne connoissoit pas encore
ses merites à Petersbourg, qu’il vouloit cependant s’abaisser à prendre
le titre d’Academicien honoraire de l’Academie Imperiale, si l’on vouloit
lui accorder une pension à Berlin etc. Je souhaite à Ring une
bonne pension de l’Academie de Berlin ; nous avons ici quelques Russes
qui tavaillent très bien, et nous enverrons peut-être un de ceux-ci en
Angleterre pour se perfectionner, comme on l’as déjà fait autre fois ;
nous avons eu par ce moyen un très habile mechanicien, et si celui-ci
n’étoit pas mort (il n’y-a pas long tems) on n’auroit pas fait des propositions
à Ring. Or Ring auroit pû très bien subsister ici, on lui auroit donné
une dixaine des apprentifs et on lui auroit payé pour chacun 200
Roubles douceur. Le Conseiller de Francheville m’a joué un mauvais tour
tour, il m’avoit prié de lui procurer quelque place à Warsovie, je me suis
donné beaucoup de peine, et aprésent comme on lui a fait des propositions
selon moi très avantageuses, je viens d’apprendre qu’il fait le difficile et
qu’il pretend des avantages trop peu acceptables. Cette conduite me fait
du tort – le Roi de Pologne a cependant répondû qu’il verroit si avec le
tems il sera en étât de procurer à Francheville les avantages qu’il demande,
mais que pour apprésent il ne Lui est pas possible d’y entrer. Dans une
des mes lettres précedentes, (dans celle qui a été accompagnée de la lettre
a Ring) je Vous ai parlé, Monsieur et très honoré Oncle ! des intentions
que l’Academie a pour le jeune Berger ; on lui donneroit 100 Roubles pour
le voyage, une pension de 150 Roubles et de l’ouvrage pour cinq ans
au mois, qu’on lui payera en Roubles comme on lui a payé à Berlin en
Ecus. Voudriez Vous bien avoir la bonté, mon très honoré Oncle, de le
sonder la dessus, mais sans vous fairecauser le moindre risque ; ou croyez Vous
que je ferai mieux d’ecrire au jeune Berger directement ? en ce cas Vous
me ferez la grace de me marquer sous quelle adresse je le pourrais faire.
Le Professeur Ginelin est arrivé heureusement et en bonne santé le 6/17 du
mois présent ; personne n’a pû tirer de lui l’affaire qui l’a forcé de quitter Berlin
aussi subitement qu’il l’a fait. Les Gazettes de Francheville sont trop
chères pour moi et je Vous ai mille obligations Monsieur et très cher
Oncle ! que Vous ne les avez pas acheté. pour moi Nous sommes très curieux
de savoir quelle fin aura prise l’affaire de Mr Beuré. Continuez mon
très honoré Oncle! de nous adoucir la perte de Votre précieuse compagnie par
des recits reitéerées de tout ce qui se passe à Berlin, quoique je ne sois
pas en étât de Vous rendre toutes les fois la pareille. Ma lettre prochaine dsera par cette raison d’autant plus grande ; en attendant mon beau père Vous
pourra communiquer l’incluse, d’où Vous verrez que nous avons été le 11
Mars à Cronstadt, que notre Pasteur Dilthei est mort le 28, et que la
rivière fût ouverte le 1er Avril. Mille Complimens de toute ma famille
à Vous, très honoré Oncle ! à toute Votre chère famille et à toutes nos connoissances
de Berlin. Je finis en Vous reiterant les sentimens du plus profond respect
avec lequel j’ai l’honneur d’être
Votre très humble et très obeïssant Serviteur
et Neveu
Quelque envie que j’aie de Vous entretenir au long, de poursuivre à Vous faire l’extrait de mon journal et surtout de répondre amplement à Vos trois agréables lettres du 17, 22 et 31 de Mars, je ne saurois avoir pour aujourd’hui cette douce satisfaction : les occupations Academiques, les diverses commissions dont je suis chargé, et surtout le triste etât de mon chèr père m’occupent tour à tour et me laissent à peine des momens libres. Je ne sais Monsieur et très honoré Oncle, si je Vous ai parlé de cette maladie, qui tourmente mon pauvre père dejà depuis le 4ème Mars : cela commencat avec un rhumatisme de plus en plus douloureuses les douleurs se jetterent ensuite dans le bas-ventre, et aprésent ce sont des angoisses terribles que mon père essuïe. Mon frère consulta un autre Medecin très habile, mais jusqu’ici on n’a pû trouver aucun rémede qui ait levé le mal radicalement : toujours de nouvelles rechûtes après des soulagemens tantôt de trois, tantôt de deux et souvent même d’un seul jour. La reponse de Lambert est grotesque, ce n’etoit point une acceptation : il dit qu’il voyoit très bien qu’on ne connoissoit pas encore ses merites à Petersbourg, qu’il vouloit cependant s’abaisser à prendre le titre d’Academicien honoraire de l’Academie Imperiale, si l’on vouloit lui accorder une pension à Berlin etc. Je souhaite à Ring une bonne pension de l’Academie de Berlin ; nous avons ici quelques Russes qui tavaillent très bien, et nous enverrons peut-être un de ceux-ci en Angleterre pour se perfectionner, comme on l’a déjà fait autre fois ; nous avons eu par ce moyen un très habile mechanicien, et si celui-ci n’étoit pas mort (il n’y-a pas long tems) on n’auroit pas fait des propositions à Ring. Or Ring auroit pû très bien subsister ici, on lui auroit donné une dixaine des apprentifs et on lui auroit payé pour chacun 200 Roubles douceur. Le Conseiller de Francheville m’a joué un mauvais tour
tour, il m’avoit prié de lui procurer quelque place à Warsovie, je me suis donné beaucoup de peine, et aprésent comme on lui a fait des propositions selon moi très avantageuses, je viens d’apprendre qu’il fait le difficile et qu’il pretend des avantages trop peu acceptables. Cette conduite me fait du tort – le Roi de Pologne a cependant répondû qu’il verroit si avec le tems il sera en étât de procurer à Francheville les avantages qu’il demande, mais que pour apprésent il ne Lui est pas possible d’y entrer. Dans une des mes lettres précedentes, (dans celle qui a été accompagnée de la lettre a Ring) je Vous ai parlé, Monsieur et très honoré Oncle ! des intentions que l’Academie a pour le jeune Berger ; on lui donneroit 100 Roubles pour le voyage, une pension de 150 Roubles et de l’ouvrage pour cinq ans au mois, qu’on lui payera en Roubles comme on lui a payé à Berlin en Ecus. Voudriez Vous bien avoir la bonté, mon très honoré Oncle, de le sonder la dessus, mais sans vous causer le moindre risque ; ou croyez Vous que je ferai mieux d’ecrire au jeune Berger directement ? en ce cas Vous me ferez la grace de me marquer sous quelle adresse je le pourrais faire. Le Professeur Ginelin est arrivé heureusement et en bonne santé le 6/17 du mois présent ; personne n’a pû tirer de lui l’affaire qui l’a forcé de quitter Berlin aussi subitement qu’il l’a fait. Les Gazettes de Francheville sont trop chères pour moi et je Vous ai mille obligations Monsieur et très cher Oncle ! que Vous ne les avez pas acheté. Nous sommes très curieux de savoir quelle fin aura prise l’affaire de Mr Beuré. Continuez mon très honoré Oncle! de nous adoucir la perte de Votre précieuse compagnie par des recits reitéerées de tout ce qui se passe à Berlin, quoique je ne sois pas en étât de Vous rendre toutes les fois la pareille. Ma lettre prochaine sera par cette raison d’autant plus grande ; en attendant mon beau père Vous pourra communiquer l’incluse, d’où Vous verrez que nous avons été le 11 Mars à Cronstadt, que notre Pasteur Dilthei est mort le 28, et que la rivière fût ouverte le 1er Avril. Mille Complimens de toute ma famille à Vous, très honoré Oncle ! à toute Votre chère famille et à toutes nos connoissances de Berlin. Je finis en Vous reiterant les sentimens du plus profond respect avec lequel j’ai l’honneur d’être
Votre très humble et très obeïssant Serviteur et Neveu
J.Albert Euler